Blanchiment d’argent en suisse : nouvelles obligations du conseiller

La nouvelle LBA étend son champ d’application à certaines activités de conseiller, notamment lorsque celles-ci présentent un risque élevé de blanchiment d’argent.

Le 26 septembre 2025, le Parlement a adopté la dernière révision du dispositif suisse de lutte contre le blanchiment d’argent, amorcée à l’été 2023. Cette réforme, issue d’un long processus législatif, s’inscrit dans la volonté du Conseil fédéral d’adapter le cadre normatif national aux exigences internationales, notamment celles du Groupe d’action financière (GAFI), en vue du cinquième examen de la Suisse prévu pour 2026-2027.

Le projet initial du gouvernement comportait deux volets distincts : d’une part, l’introduction d’un registre fédéral des ayants droit économiques des personnes morales par la nouvelle loi sur la transparence des personnes morales (LTPM) ; d’autre part, une série de modifications substantielles de la loi sur le blanchiment d’argent (LBA) et notamment l’assujettissement des conseillers, parmi lesquels les avocats et les notaires, au champ d’application de celle-ci.

C’est ce dernier point, qui a suscité les débats les plus nourris. Initialement intégrée au projet gouvernemental, cette réforme a été extraite du paquet législatif par le Conseil des États en décembre 2024 afin qu’il fasse l’objet d’un traitement séparé (« projet 2 »). Contre toute attente, les deux textes (LTPM et LBA) ont finalement été adoptés simultanément lors du vote final du Parlement en septembre dernier, marquant une étape décisive dans le complètement du dispositif anti-blanchiment suisse.

On précisera que le projet initial a été drastiquement réduit par le Conseil des États en juin 2025 à la suite du Rapport de la Commission des affaires juridiques du 15 mai 2025. Ainsi, seules les activités de conseil présentant un risque élevé de blanchiment d’argent seront désormais visées.

D’emblée, la nouvelle mouture de la LBA (nLBA) se distingue par les nombreuses incertitudes qu’elle soulève, tant du point de vue de son champ d’application que de la portée des obligations qu’elle instaure pour les avocats et les notaires, avec notamment pour point d’orgue le secret professionnel.

L’entrée en vigueur de la nLBA n’est pas encore fixée mais est attendue à la mi-2026, afin que le GAFI puisse en tenir compte lors de sa prochaine évaluation mutuelle de la Suisse. En date du 15 octobre 2025, le Conseil fédéral a ouvert la consultation sur les ordonnances d’application, notamment la nOBA.

Si la révision a déjà été largement commentée par les milieux intéressés, il ne s’agit pas ici d’en proposer une nouvelle critique générale et notamment de déterminer si la nLBA sera acceptée au plan international, mais plutôt d’examiner concrètement les dispositions spécifiques auxquelles les conseillers, et plus particulièrement les avocats et les notaires, seront désormais soumis. Dans ce contexte, l’analyse portera exclusivement sur les modifications apportées à la LBA, en laissant de côté le registre des ayants droit économiques. Nous nous référerons dans la mesure du possible au Message du Conseil fédéral ainsi qu’au Rapport explicatif sur les ordonnances.

La modification de l’article 2 al. 1 let. c nLBA introduit un nouveau statut de « conseiller ». L’al. 1 pose ainsi le principe selon lequel la loi sur le blanchiment d’argent est désormais applicable à trois catégories de personnes : les intermédiaires financiers (let. a), les négociants (let. b) et, nouvellement, les conseillers (let. c).

Est réputée « conseiller », la personne morale ou physique qui, à titre professionnel, participe pour le compte de tiers à des transactions financières, y compris l’organisation de fonds, en relation avec des opérations juridiques spécifiques (voir ci-dessous pour celles-ci).

Il ressort du texte légal que le degré d’implication du professionnel nécessaire pour entraîner son assujettissement au dispositif légal demeure incertain et sujet à interprétation, nonobstant le projet d’ordonnance. La nouvelle formulation se distingue du projet initial du Conseil fédéral qui visait les activités de conseil en vue de préparer ou exécuter une opération portant sur certaines activités spécifiques, qu’il y ait ou non une transaction financière. La mouture finalement adoptée par le Parlement peut laisser penser qu’un professionnel ne serait pas soumis à la nLBA, s’il conseille un client pour la création d’une société par exemple mais ne participe pas au transfert ultérieur des valeurs patrimoniales à proprement parler. Il y a là un flou juridique.

La seule certitude à ce stade réside dans le fait que le pouvoir de disposition sur les avoirs du tiers par le conseiller ne constitue pas, en l’espèce, le critère déterminant de l’assujettissement à la loi sur le blanchiment d’argent, contrairement à ce qui prévaut pour la qualification d’une activité d’intermédiation financière.

Cette approche n’est d’ailleurs pas nouvelle, puisqu’elle s’applique déjà à la catégorie des négociants, pour lesquels le critère de disposition sur les valeurs de tiers n’est également pas décisif.

En effet, selon le message du Conseil fédéral, « une limitation du champ d’application de la LBA à l’intermédiation financière ou aux cas dans lesquels une personne peut disposer des valeurs patrimoniales d’un tiers ne permet plus de lutter efficacement contre le blanchiment d’argent et donc contre le crime organisé, d’autant que ni le blanchiment d’argent, ni les recommandations internationales pertinentes, ni les législations d’autres juridictions ne font cette distinction. Les criminels essaient constamment de trouver de nouveaux moyens de contourner les mesures préventives existantes pour lutter contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. En raison de l’écart de réglementation entre le secteur financier et le secteur non financier, ils ont de plus en plus fréquemment recours aux services du secteur non financier à des fins de blanchiment d’argent. »

D’après les travaux de la Commission des affaires juridiques et le projet d’ordonnance, la notion de « participation » comprend toute activité qui représente une contribution causale aux opérations juridiques visées, sans laquelle l’opération ne serait pas réalisée.

Ainsi, de manière générale, l’activité assujettie consiste à assister un client dans la préparation ou la réalisation d’une opération. La phase de préparation comprend notamment la fourniture de conseils, par exemple sur le choix d’une structure juridique adaptée, ainsi que la rédaction ou la révision des actes juridiques ou comptables en lien avec l’opération envisagée, tels qu’un contrat de vente immobilière, les statuts d’une société de domicile, le préparation d’un bilan intermédiaire, la due diligence de documents, pour autant que ces prestations soient rattachées à une activité visée par les lettres a à e de la disposition légale. L’inscription dans un registre de même que l’ouverture d’une relation bancaire entrent dans le champ d’application de la nLBA.

De même, l’opération en cause peut porter sur toute forme de transformation ou de transmission de valeurs patrimoniales. Selon nous, elle ne suppose pas nécessairement l’existence d’un flux financier direct, mais peut justement concerner uniquement des opérations juridiques préparatoires, comme la création d’une société à laquelle des valeurs patrimoniales seront ultérieurement transférées, sans l’intervention du conseiller.

Par ailleurs, l’activité du conseiller doit être en lien avec une opération juridique concrète. Les clarifications et les renseignements purement planifiés et abstraits sur la situation juridique, qui n’ont pas de lien apparent avec une opération juridique effectivement envisagée, ne sont pas visés. Lorsque le conseil se limite à certains aspects spécifiques d’une opération, sans porter de manière substantielle sur la préparation ou l’exécution de celle-ci, il n’est en principe pas assujetti au dispositif légal. Ainsi, le simple fait de rendre un avis juridique concernant l’admissibilité d’une obligation contractuelle ne constitue pas une activité assujettie. En revanche, le fait de rédiger la clause correspondante dans le contrat relève d’une assistance directe à la réalisation de l’opération et entre, à ce titre, dans le champ d’application de la réglementation.

En outre, l’assujettissement est défini sur la base de l’activité exercée, et non pour un groupe professionnel concerné (contrairement au projet initial, qui visait spécifiquement les avocats (assujettis ou non à la LLCA), les notaires et les autres juristes indépendants ainsi que les réviseurs ou comptables exerçant leur activité de manière indépendante). Dès lors, toute personne exerçant cette activité, à titre professionnel, c’est-à-dire avec une certaine régularité et ampleur, sera tenue de respecter les obligations prévues par le dispositif de lutte contre le blanchiment d’argent, à condition toutefois qu’elle exerce cette activité à titre professionnel.

Enfin, les personnes visées peuvent exercer leur activité en leur nom propre et à leur propre compte, ou au sein d’une structure juridique (étude ou fiduciaire), pourvu que celle-ci fournisse des prestations de services à des tiers dans les domaines d’activité mentionnés. En revanche, les personnes qui exercent leur activité au sein d’une entreprise et pour le compte de celle-ci, sans offrir de tels conseils à des tiers externes à l’entreprise, tels que les collaborateurs du service juridique ou comptable d’une société, ne sont pas concernés. Il en va de même s’agissant des personnes employées par une société qui fournissent des prestations à d’autres sociétés du même groupe (art.2 al. 3 proj. OBA.

L’assujettissement commence dès l’acceptation du mandat portant sur une activité définie aux let a à e de l’article 2 al. 3bis nLBA, pour autant que le conseiller entre dans le champ d’application et exerce son activité à titre professionnel.

La nLBA prévoit l’assujettissement d’une nouvelle catégorie d’activités spécifiques au dispositif anti-blanchiment, désignées par la loi. Celles-ci concernent :

  1. la vente ou l’achat d’un immeuble (let. a) ;
  2. la création ou la fondation d’une entité juridique non opérationnelle dont le siège est en Suisse ou d’une entité juridique dont le siège est à l’étranger (let. b) ;
  3. la gestion ou l’administration d’une entité juridique non opérationnelle (let. c) ;
  4. les apports et distributions d’une entité juridique non opérationnelle (let. d) ;
  5. la vente ou l’achat d’une entité juridique lorsque la vente ou l’achat intervient au travers d’une entité juridique non opérationnelle (let. e).

Les entités juridiques non opérationnelles regroupent les personnes morales, les sociétés, les établissements, les fondations, les trusts, les entreprises fiduciaires ou les autres relations similaires qui n’ont pas été fondées ou gérées dans le but d’exploiter ou de soutenir les activités opérationnelles d’une entreprise ou d’un groupe, en particulier les sociétés de domicile.

Par sociétés de domicile, on entend « les personnes morales, sociétés, établissements, fondations, trusts, entreprises fiduciaires et structures semblables, qui n’exercent pas une activité de commerce ou de fabrication, ou une autre activité exploitée en la forme commerciale » (art. 6 al. 2 OBA).

On relève que la notion d’entité non-opérationnelle est nouvelle dans la législation suisse et qu’il conviendra de voir comment elle sera interprétée par les tribunaux et la FINMA. Là encore, une nouvelle source d’incertitude est introduite.

En outre, cette classification peut être malaisée en pratique. Il peut en effet être difficile d’identifier l’activité d’une société lors de sa création, soit précisément lorsque les obligations de diligence s’appliquent. Par ailleurs, les activités commerciales et les buts d’une société peuvent évoluer au cours de son cycle de vie. De même, un minimum d’activités opérationnelles permettrait de contourner la nouvelle réglementation. Enfin, on peut douter que le GAFI accepte l’approche sélective suisse visant à exclure les sociétés opérationnelles suisses en sachant que toute société opérationnelle peut servir de plateforme pour blanchir de l’argent, notamment dans les affaires de corruption.

Sont également concernées par la nLBA (art. 2 al. 3ter), les activités consistant à mettre à disposition d’une entité juridique une adresse ou des locaux à titre de domicile ou de siège pour une durée supérieure à six mois. Tous les types d’entités juridiques sont concernées ici y compris, bien que ce cas soit rare en pratique, les sociétés opérationnelles suisses ou étrangères.

Dans le détail, le première lettre vise toute activité de conseil consistant à préparer ou à exécuter une transaction immobilière (vente ou achat), et inclut la promesse de vente, le contrat de vente, la conclusion d’une cession d’actifs (asset deal) ou d’une cession d’actions (share deal) lorsque l’opération porte sur une part de la société immobilière concernée ou permet le transfert d’un bien immobilier.

La définition d’immeuble est celle du Code civil (art. 655 al. 2 CC). Sont ainsi des immeubles les biens-fonds, les droits distincts et permanents immatriculés au Registre foncier, les mines et les parts de copropriété d’un immeuble. 

D’après le projet d’ordonnance, sont également concernés les opérations suivantes (art. 12 al. 2 proj. OBA) :

a. les actes juridiques qui ont les mêmes effets économiques qu’une aliénation sur le pouvoir de disposer d’un immeuble ;

b. la constitution de servitudes de droit privé sur un immeuble ou les restrictions de droit public à la propriété foncière, lorsque celles-ci limitent l’exploitation ou diminuent la valeur vénale de l’immeuble de manière durable et essentielle et qu’elles donnent lieu à une indemnité ;

c. le transfert de participations à des sociétés immobilières ;

d. les plus-values résultant de mesures d’aménagement au sens de la loi du 22 juin 1979 sur l’aménagement du territoire.

En outre, la transaction immobilière doit donner lieu à une contre-prestation, y compris sous forme d’échange. Sont donc exclues les mutations à titre gratuit (donation, succession), ainsi que les opérations réalisées dans le cadre d’un divorce ou d’un pacte successoral, lorsqu’elles interviennent entre les personnes directement concernées (par exemple entre époux). Toutefois, au vu de la formulation du texte juridique adopté par le Parlement à l’article 2 al. 4ter let. a nLBA (la mention « ou »), il subsiste une incertitude quant à savoir si une donation d’un immeuble en faveur de personnes non-apparentées au sens de la OEFin pourrait être soumise à exception (voir ci-dessous).    

Enfin, le conseil doit porter sur une opération immobilière envisagée par le client. Sont donc exclus les conseils généraux en matière de droit immobilier. Il en va de même s’agissant des litiges postérieurs à la transaction immobilière (par exemple une action en garantie des défauts de l’immeuble).

On relèvera que de nombreuses incertitudes subsistent quant au champ d’application exact de la disposition. Se pose par exemple, la question de savoir si la seule préparation d’un contrat d’entreprise totale par un avocat, portant sur un bien-fonds acquis simultanément par le maître d’ouvrage, pourrait être considérée comme une activité assujettie. De même, la vente des actions d’une régie immobilière détenant un portefeuille d’immeubles devrait, en principe, entrer dans le champ de la loi, même si la société concernée revêt un caractère manifestement opérationnel.

Sont principalement visés ici les trusts, les fondations de famille et les sociétés de domicile, peu importe que le siège de la structure soit situé en Suisse ou à l’étranger. Les démarches visées englobent l’ensemble des actes nécessaires à la création d’une entité juridique non opérationnelle, qu’il s’agisse des conseils relatifs à sa structuration ou de la rédaction des documents constitutifs tels que le trust deed, l’acte de fondation ou la relecture des statuts. Sont également concernées la délivrance d’avis juridiques (legal opinions dans le cadre d’une due diligence) lorsqu’ils se rapportent à une opération concrète, dès lors que les vérifications effectuées s’inscrivent dans la préparation d’une opération et constituent ainsi des actes préparatoires étroitement liés à sa réalisation. En outre, sont comprises dans le champ d’application les opérations relatives à la structure ou à l’administration d’une entité juridique non opérationnelle, notamment celles ayant trait à ses sources de financement (fonds propres ou emprunts), ainsi qu’au traitement des formalités d’inscription auprès des registres officiels, tels que le registre du commerce, le registre de la TVA ou le registre de transparence. Enfin, la création de sociétés opérationnelles à l’étranger tombe également dans le champ d’application de la loi, ce qui soulève la question de ce qu’il convient d’entendre par « à l’étranger » (lieu du siège de la société, de son administration effective, de son pays d’incorporation, etc.), Ainsi, la législation pourrait être contournée par la constitution d’une société opérationnelle en Suisse, mais administrée depuis l’étranger par des personnes interposées.

À noter que si le conseiller fournit de manière supplémentaire des services en relation avec le trafic de paiement, par exemple en transférant un paiement depuis son compte professionnel, il est assujetti en qualité d’intermédiaire financier.

Le conseiller est également assujetti lorsqu’il prépare ou exécute une opération en relation avec la gestion ou administration d’une entité juridique non opérationnelle. Selon le message du Conseil fédéral, deux critères permettent de circonscrire l’activité entrant dans le champ d’application de la lettre c) :

En premier lieu, l’activité visée concerne la structure juridique elle-même, et non les opérations qu’elle exerce. Le conseiller est ainsi assujetti lorsqu’il prépare une opération liée à la « vie de l’entité », à la désignation ou aux compétences des organes de celle-ci ou des personnes occupant une fonction équivalente. Par exemple, il peut s’agir de modifier les bénéficiaires d’un trust ou de réorganiser les participations au sein d’un groupe de sociétés (sauf exceptions ci-dessous). En revanche, les conseils relatifs à l’activité opérationnelle de l’entité, par exemple les questions liées au droit du travail ou de la sécurité sociale ne sont pas concernés. La tenue, la vérification ou l’audit des comptes d’une société constituent également, en principe, des activités assujetties pour autant qu’elle soit exercée à titre professionnel par la personne concernée.

En second lieu, l’activité assujettie doit être liée à une opération et un flux financier, un transfert de valeurs patrimoniales ou un acte entraînant une modification de la structure juridique de l’entité. Le seul fait de désigner un administrateur ou un fondé de pouvoir (nomination, inscription au registre du commerce, etc.) n’est donc pas visé en règle générale. De la même manière, l’assistance apportée en relation avec la conclusion d’une convention d’actionnaires peut être pertinente si elle est accompagnée d’un transfert de valeurs patrimoniales ou d’une nouvelle structuration de la société de domicile. En revanche, le conseil juridique qui porte sur la seule conclusion d’un accord relatif à la gestion de l’entité n’est pas concerné.

Comme relevé ci-dessus, un conseil sur une question juridique liée à la gestion ou l’administration d’une entité non opérationnelle de manière générale, lorsqu’il ne porte sur aucune opération envisagée, n’est pas visé.

Au vu de ce qui précède, il apparaît que les frontières du champ d’application demeurent floues et largement sujettes à interprétation, en particulier en ce qui concerne les activités liées aux sociétés de domicile. Ainsi, des incertitudes persistent quant à savoir si certaines interventions, telles que la relecture d’un contrat d’investissement ou la préparation d’un mandat de gestion de fortune avec un gérant externe, doivent être considérées comme tombant sous le coup de la loi.

À noter que l’activité exercée en tant qu’organe d’une société de domicile, de trustee ou de membre du conseil de fondation n’est pas non plus concernée par cette disposition. Un tel mandat correspond, en effet selon le droit actuel en vigueur, à une activité d’intermédiaire financier au sens de la LBA (cf. art. 6 al. 1 let. d OBA).

L’organisation des apports comprend le financement d’une entité juridique non opérationnelle par des fonds propres ou par des capitaux étrangers. L’activité assujettie peut ainsi consister à conseiller ou assister un client pour ouvrir les comptes bancaires destinés à la consignation du capital ou pour organiser un emprunt ou une augmentation de capital. La préparation des documents nécessaires, par exemple les décisions de l’assemblée générale, du conseil d’administration ou les procès-verbaux de séances, est aussi visée. Il en va de même des distributions provenant d’un trust ou d’une fondation de famille, ainsi que des dividendes versés aux actionnaires d’une société de domicile.

L’activité consistant à préparer ou exécuter la vente ou l’achat d’une entité juridique est assujettie lorsqu’elle s’effectue par l’intermédiaire d’une entité juridique non opérationnelle. Sont notamment visées les cessions de sociétés sous-jacentes à un trust (underlying companies), y compris lorsque ces dernières exercent une activité opérationnelle.

Ainsi est concerné tout acte juridique permettant, de manière directe ou indirecte, le transfert d’une part majoritaire de l’entité. Est également assujettie la cession séparée d’éléments incorporels d’une entité, tels que le transfert d’un contrat de bail ou de droits de propriété intellectuelle. La transformation d’une entité qui n’aboutit pas à la création d’une nouvelle entité peut également être soumise.

L’activité de domiciliation consiste à offrir une adresse ou des locaux à titre de siège à une société, une fondation ou un trust par exemple. Elle doit être exercée à titre professionnel, c’est-à-dire dans le but d’obtenir un revenu régulier, et viser principalement la mise à disposition d’une adresse que le prestataire sait destinée à servir de siège à l’entité.

Des prestations accessoires peuvent être proposées (mise à disposition de bureaux, traitement ou renvoi de la correspondance, transfert d’appel, etc.). L’adresse offerte sera le plus souvent la propre adresse commerciale du conseiller. Le seul fait de louer un immeuble à une société ne suffit pas pour entraîner l’assujettissement ; en règle générale, le but de la prestation fournie par le bailleur n’est pas la fourniture d’une adresse à titre de siège mais bien la cession de l’usage d’un bien immobilier.

Tout d’abord, sont expressément exclus les avocats et les notaires qui exercent une activité dans le cadre de procédures judiciaires, pénales, administratives ou arbitrales, y compris la représentation dans une procédure et le conseil en lien avec la préparation et l’exécution d’une procédure, la clarification d’un état de fait, l’appréciation des risques de procès, la manière de prévenir une telle procédure ou l’exécution des résultats de la procédure.

L’exemption vise ainsi clairement l’activité dite « judiciaire » des avocats. Il convient toutefois de ne pas confondre l’activité dite « typique » de l’avocat, inhérente à sa profession et couverte par le secret professionnel, qui comprend le conseil juridique, la rédaction d’actes et la représentation devant les autorités (ATF 135 III 410), avec son activité « atypique », de nature plus commerciale ou administrative, comme le mandat d’administrateur, la gestion de fortune ou encore l’intermédiation financière (escrow agent) (voir REISER/VALTICOS, Les règles professionnelles et les activités atypiques de l’avocat inscrit au barreau, in SJ 2015 p. 191).

En effet, si l’activité atypique, telle que la domiciliation de sociétés, reste soumise au dispositif de lutte contre le blanchiment d’argent (LBA), il n’en allait pas de même pour l’activité typique jusqu’à ce jour. Ainsi, certaines prestations, bien qu’appartenant à l’activité traditionnelle de l’avocat, peuvent néanmoins entrer dans le champ d’application de la nouvelle LBA (nLBA). Tel est le cas, par exemple, du conseil en lien avec la vente d’une société de domicile ou d’un immeuble, qui sera soumis aux obligations de diligence prévues par la législation anti-blanchiment. En revanche, s’agissant de l’activité typique de l’avocat, il n’y aura aucune obligation de communiquer au MROS en cas de soupçons fondés de blanchiment d’argent (voir ci-dessous).

En outre, sont exclus du champ d’application de la loi, les conseillers qui sont autorisés ou surveillés par l’Autorité fédérale de surveillance en matière de révision pour leur activité de révision ou d’audit.  Cette exception vise à distinguer les activités exercées par les professionnels du domaine comptable selon qu’ils interviennent en qualité d’organe de la société ou en qualité de mandataire externe. Seules les activités relevant de cette seconde catégorie sont soumises aux obligations de diligence prévues par la LBA.

L’article 2 al. 4ter nLBA prévoit aussi des exceptions au champ d’application de la loi en raison du faible risque de blanchiment d’argent ou de financement du terrorisme qui est lié à ces activités ou transactions. Cela concerne notamment :

  • les transactions portant sur des immeubles ou des entités juridiques relevant du droit de la famille, du droit matrimonial, du droit des successions ou de la donation ou qui opposent des personnes liées entre elles au sens de l’article 2 al. 2, let. a LEFin (voir l’article 4 OEFin, on vise notamment les transactions entre personnes ayant des liens économiques, c’est-à-dire entre sociétés et entités d’un même groupe, ainsi qu’entre parents, alliés en ligne directe, en ligne collatérale jusqu’au quatrième degré, conjoints, partenaires et cohéritiers) ;
  • les transferts d’immeubles ou d’entités juridiques d’une valeur inférieure à 5 millions de francs, dans la mesure où le prix d’achat est versé et reçu exclusivement par l’intermédiaire de banques ou d’autres intermédiaires financiers soumis à la loi ;
  • l’achat d’immeubles d’habitation pour un usage propre en Suisse (c’est-à-dire occupés par leur propriétaire, soit tous les immeubles non acquis à des fins de rendement) ou l’achat d’immeubles d’habitation servant d’immeubles de remplacement en Suisse au sens de l’art. 12, al. 3, let. e, de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l’harmonisation des impôts directs des cantons et des communes ;
  • les activités d’organe pour des entités juridiques opérationnelles, pour des fondations d’utilité publique ou des associations opérationnelles ayant leur siège en Suisse ;
  • la création d’une fondation pour cause de mort ;
  • l’authentification de documents sans activité de conseil accessoire.

La loi mentionne que la constitution d’une fondation pour cause de mort (au sens de l’article 493 CC exclusivement ?) est exclue du champ d’application de la loi. A notre sens, il devrait en être de même s’agissant de la création d’un trust par testament et de tout type de fondation, y compris celles d’entretien.

Il ressort de ce qui précède que s’il est clair que le juriste ou le notaire qui rédige un testament, une convention de divorce ou d’entretien ou celui qui conseille un client sur ses droits ou ses devoirs en la matière, n’est pas soumis à la nouvelle loi sur le blanchiment d’argent, qu’en est-il de l’exécuteur testamentaire contraint de céder un bien immobilier à un tiers.

De même, la plupart des trusts comportent des éléments successoraux ou matrimoniaux. Faut-il considérer qu’un avocat qui conseille un trustee dans le cadre de la liquidation d’un trust à vocation successorale est assujetti à la loi ? Ces interrogations montrent la complexité de la délimitation entre les activités soumises et celles exclues du dispositif.

Enfin, dans les cas où une partie de l’activité du conseiller entre dans le champ d’application de la loi tandis qu’une autre en est exonérée, il sera difficile d’opérer une distinction claire. Dans le doute, les avocats et notaires auront tout intérêt à soumettre l’ensemble de leur activité à la nLBA. Cela ne résout toutefois pas la question sensible des communications au MROS lorsqu’elles sont couvertes par le secret professionnel (voir ci-dessous).

Par ailleurs, alors qu’on pouvait s’attendre à ce que l’ordonnance d’exécution précise les seuils à partir desquels un conseiller est réputé exercer son activité à titre professionnel, par exemple en fonction du revenu annuel tiré de cette activité ou du nombre de mandats acceptés au cours d’une même année civile, ces attentes semblent aujourd’hui déçues.

En effet, d’après le proj. OBA (art. 12f), le conseil est réputé pratiqué à titre professionnel lorsqu’il constitue une activité économique indépendante orientée vers l’obtention d’un revenu. En outre, que le conseil soit pratiqué à titre d’activité principale ou accessoire n’est pas déterminant.

Selon le Rapport explicatif, pour déterminer si une activité de conseil est exercée à titre professionnel, le critère décisif n’est pas le nombre d’opérations effectuées, mais leur contexte. Les conseils donnés à titre privé sont exclus. En revanche, dès lors qu’un conseil est fourni dans le cadre d’une activité économique indépendante orientée vers l’obtention d’un revenu, les obligations de diligence s’appliquent, même pour une seule opération visée. L’exercice professionnel est en principe présumé lorsqu’il s’inscrit dans une activité organisée, telle qu’une étude d’avocats, une fiduciaire ou un gérant de fortune, même si seule une partie des prestations relève du champ d’application de la loi. Cette présomption peut notamment découler de la manière dont le prestataire présente ses services (sites internet, brochures, communication commerciale, etc.). Le caractère « indépendant » implique par ailleurs que seules les activités exercées au profit de tiers sont concernées, à l’exclusion de celles réalisées pour les besoins internes d’une société ou d’un groupe. Enfin, le fait que le conseil soit exercé à titre principal ou accessoire, ou qu’il s’effectue avec ou sans locaux professionnels, n’a pas d’incidence sur l’assujettissement.

L’introduction du régime applicable aux conseillers parallèlement à celui des intermédiaires financiers, nécessite une coordination entre les deux dispositifs. À cet effet, l’article 2b nLBA définit les règles de coordination du point de vue de l’assujettissement matériel, tandis que l’article 12a règle la coordination en matière de surveillance.

Selon l’alinéa 1 de l’article 2b nLBA, les dispositions relatives aux conseillers s’appliquent de manière subsidiaire à celles régissant l’intermédiation financière. Ainsi, lorsqu’une activité relève à la fois du conseil (art. 2 al. 3bis, ou 3ter) et de l’intermédiation financière (art. 2 al. 2 ou 3 LBA) (par exemple, une activité de conseil portant sur la vente d’un bien immobilier avec un contrat de séquestre auprès de l’intermédiaire financier), ce sont les règles applicables aux intermédiaires financiers qui prévalent. En d’autres termes, les activités déjà couvertes par la notion d’intermédiation financière demeurent soumises au régime existant, les nouvelles dispositions sur les conseillers ne visant que des activités jusqu’ici non concernées par la LBA.

Par ailleurs, l’alinéa 2 de l’article 2b nLBA prévoit le cas où une même personne ou entreprise exerce à la fois des activités d’intermédiation financière et de conseil, par exemple un gérant de fortune qui conseille sur la vente d’un immeuble. Dans ce cas, chaque activité est soumise à son propre régime juridique. Toutefois, lorsque la distinction entre ces activités s’avère difficile à opérer, la loi permet à la personne assujettie de soumettre volontairement l’ensemble de son activité au régime des intermédiaires financiers par déclaration.

Le Conseil fédéral a précisé dans son projet d’ordonnance les modalités de cette déclaration, notamment sa forme, son délai et l’autorité de surveillance compétente (art. 2a proj. OBA). Celle-ci devra être adressée à l’autorité ou à l’organisme compétent pour la surveillance et devra contenir l’ensemble des informations exigées par cette autorité ou cet organisme, notamment une description précise des activités concernées ainsi que les éventuelles modifications de l’organisation interne qu’elles impliquent, y compris les adaptations des règlements intérieurs. Curieusement et de manière peu claire, il est prévu que la déclaration ne sera valable qu’à partir du 1er janvier de l’année civile qui suit son envoi à l’autorité ou à l’organisme compétent.

Les intermédiaires financiers qui sont surveillés par la FINMA, notamment au travers d’organismes de surveillance, comme les gestionnaires ou les trustees comme Onyx & Cie SA n’auront pas besoin de s’affilier à un OAR et verront l’OBA-FINMA s’appliquer par analogie.

Le conseiller doit remplir les obligations suivantes (art. 8b nLBA) :

  • vérifier l’identité du client (art. 3 al. 1 LBA) ;
  • identifier l’ayant droit économique (art. 4 al. 1 et 2, let. a et b LBA) ;
  • établir et conserver les documents (art. 7 LBA), sous forme écrite ou électronique.

Une fois le mandat clos, le conseiller doit conserver les documents relatifs à ses obligations pendant une période de dix ans.

Les conseillers doivent en outre identifier l’objet et le but de l’opération ou de la prestation souhaitée par le client (art. 8b al. 2 nLBA) ainsi que clarifier l’arrière-plan et le but de l’opération ou de la prestation lorsque les risques élevés présentés par celle-ci ou par le client le justifient.

L’étendue des informations à collecter est fonction du risque que représente l’opération, la prestation de services ou le client (art. 8c nLBA). Les organismes d’autorégulation (OAR) définiront l’étendue des obligations de diligence (simplifiées ou accrues selon les risques faibles ou élevés présentés par l’opération, la prestation ou le client) pour les conseillers qui leur sont affiliés.

Par exemple, un homme d’affaires originaire d’un pays à haut risque, entretenant des liens avec une personne politiquement exposée (PEP), et souhaitant créer une structure de trust complexe impliquant plusieurs juridictions offshores pour y investir des millions de dollars, nécessitera des mesures de diligence renforcées que le conseil à un entrepreneur suisse, bien connu du conseiller depuis 20 ans et régulièrement son client, pour l’achat d’un immeuble commercial à Genève.

Il convient ainsi de tenir compte non seulement du profil de risque du client lui-même mais également des facteurs de risque liés à l’opération ou à la prestation de services.

Le conseiller doit instaurer des mesures proportionnées à la taille de son entreprise et au niveau de risque de son activité afin de prévenir le blanchiment d’argent, le financement du terrorisme et les violations des sanctions économiques (LEmb). Il doit notamment former son personnel de manière adéquate et mettre en place des contrôles internes appropriés (art. 8d nLBA).

à noter que lorsque le conseiller est un avocat ou un notaire qui exerce une activité soumise au secret professionnel, il doit également veiller à séparer de manière rigoureuse la documentation soumise au secret professionnel et celle qui ne l’est pas, pour prévenir la divulgation des faits couverts par le secret. Ainsi, lorsqu’un avocat conseiller exerce simultanément des activités typiques, couvertes par le secret professionnel, et des activités atypiques, il doit s’organiser de manière à assurer tant le respect de la règlementation anti-blanchiment que de celle applicable à la profession d’avocat.

Le conseiller doit communiquer ses soupçons aux mêmes conditions qu’un intermédiaire financier, en les adaptant toutefois à son activité. Il doit donc notamment communiquer au MROS ses soupçons s’il sait ou présume sur la base de soupçons fondés que des valeurs patrimoniales impliquées dans l’opération pour la préparation ou l’exécution de laquelle il assiste son client (art. 2 al. 3bis nLBA) ou la prestation de service qu’il effectue pour son client (art. 2 al. 3ter nLBA) (1) sont en rapport avec le blanchiment d’argent, (2) proviennent d’un crime ou d’un délit fiscal qualifié, (3) sont soumises au pouvoir de disposition d’une organisation criminelle ou terroriste ou (4) servent au financement du terrorisme (art. 9 al. 1ter nLBA). Il en va de même si le conseiller rompt des négociations portant sur ses services en raison de soupçons fondés.

L’avocat ou le notaire n’est tenu de communiquer ses soupçons au MROS que lorsqu’il effectue une transaction financière au nom ou pour le compte de son client, par exemple en recevant des fonds sur son compte professionnel pour les transférer à un tiers. Cette obligation découle de son rôle d’intermédiaire financier et ne s’applique pas à l’avocat qui exerce une activité purement juridique de conseil ou de représentation en justice, sans intervenir dans des opérations financières (art. 9 al. 2 nLBA).

Par ailleurs, même lorsqu’une transaction financière est en cause, la communication n’est pas requise si les informations concernées sont couvertes par le secret professionnel au sens de l’article 321 CP (art. 9 al. 2 nLBA). Ce secret vise à protéger la confiance du client et s’applique uniquement aux activités typiques de l’avocat, conseil juridique et représentation, mais non aux activités dites atypiques, telles que la gestion de fortune, l’administration de sociétés ou les opérations financières (voir ci-dessus, étant rappelé que les activités exercées comme conseiller par la nouvelle législation sur le blanchiment d’argent peuvent être typiques ou non). à noter que la distinction entre les activités couvertes ou non par le secret professionnel demeure délicate, en particulier dans les mandats mixtes mêlant tâches juridiques protégées et opérations financières soumises à déclaration au MROS. Cette incertitude accroît le risque pour l’avocat de violer soit son secret professionnel, soit son obligation de communication.

Le conseiller qui effectue une communication au MROS peut rompre la relation d’affaires en tout temps (art. 9b al. 2bis nLBA). En principe, un conseiller n’a pas la garde des avoirs de ses clients ni accès direct à leurs valeurs patrimoniales, contrairement à un intermédiaire financier. Il n’est donc pas pertinent de lui appliquer le même régime réglementaire que celui applicable aux intermédiaires financiers sur ce point. Le conseiller doit toutefois informer sans délai le MROS de la date de la fin de la relation d’affaires (art. 9 al. 3 LBA).

Bien entendu, et sauf exception, le conseiller a l’interdiction d’informer toute personne concernée ou tout tiers du fait qu’il a effectué une communication au MROS, comme c’est déjà le cas pour les intermédiaires financiers et les négociants (art. 10a al. 5 nLBA).

à noter encore que le conseiller qui, de bonne foi, communique des informations au MROS en vertu de l’article 9 al. 1ter nLBA n’engage pas sa responsabilité pénale et civile et ne peut être poursuivi pour violation du secret de fonction, du secret professionnel ou du secret d’affaires, ni être rendu responsable de violation de contrat (art. 11 LBA). Attention toutefois, le cercle des destinataires de cet article correspond à celui des personnes tenues d’agir en vertu des articles 9 et 10 LBA. Partant, les avocats et les notaires ne peuvent pas informer volontairement le MROS s’agissant d’informations couvertes par le secret professionnel sous peine de violer l’article 321 CP.

Désormais, avec la nouvelle loi sur le blanchiment d’argent, les conseillers seront surveillés et auront l’obligation (parallèlement au droit) de s’affilier à un organisme d’autorégulation reconnu (OAR) (art. 12 let. d et 14 al. 1 nLBA).

D’après l’article 12g al. 1 let.a proj. OBA, le conseiller qui passe à l’exercice d’une activité à titre professionnel est aussitôt tenu de respecter les obligations visées aux art. 3 à 11a nLBA.

à relever que toute personne qui est affiliée à un organisme d’autorégulation reconnu en raison de son activité d’intermédiaire financier au sens de l’article 2 al. 3 LBA et qui exerce une activité de conseiller est soumise à la surveillance de cet organisme d’autorégulation pour l’ensemble de ses activités (art. 12a al. 2 nLBA). Cette règle a pour objectif d’éviter qu’en pareil cas, la compétence en matière de surveillance ne soit fragmentée entre plusieurs autorités, garantissant ainsi une application cohérente et centralisée du contrôle.

Ainsi, le conseiller dispose d’un délai de deux mois (art. 12g al. 1 let. b proj OBA) à compter du changement de statut pour déposer une demande d’affiliation à un OAR ou déclarer son activité de conseiller auprès de l’autorité ou de l’organisme de surveillance compétent, par exemple, lorsqu’un gérant de fortune ou un trustee commence à exercer une activité de conseil assujettie et doit en informer l’organisme de surveillance compétent (par exemple l’AOOS). Durant ce délai, le conseiller peut continuer son activité de conseil avec les clients qu’il avait déjà au moment de son changement de statut et leur fournir des conseils sur de nouvelles opérations juridiques pour lesquels il est assujetti. Faute de demande dans ce délai, ou en cas de rejet de la demande d’affiliation, il lui est interdit de poursuivre son activité de conseiller (art. 12g al. 2 proj. OBA).

Attention, comme auparavant, seul un avocat ou un notaire peut contrôler le respect des dispositions de la LBA par un autre avocat ou notaire (art. 18a nLBA). Il convient donc à ces personnes de s’affilier à l’Organisme d’autoréglementation de la Fédération Suisse des Avocats et de la Fédération Suisse des Notaires.

L’avocat est tenu de conserver séparément les dossiers relatifs à ses activités typiques et atypiques et ne peut donner accès aux données de ses clients que dans la mesure strictement nécessaire à la vérification du respect de ses obligations au titre de la LBA.

Le contrôle doit être conduit dans le strict respect du secret professionnel, en deux étapes (art. 18a al. 3 et 4 nLBA). Le contrôleur procède d’abord à un examen des procédures internes du conseiller, sans avoir accès aux informations protégées par le secret professionnel.

L’avocat ou le notaire doit mettre à disposition :

  • une documentation interne complète, incluant un règlement sur la répartition des risques, la procédure d’ouverture de mandat et les mesures organisationnelles découlant de l’article 8d LBA.
  • une liste des mandats assujettis, accompagnée d’une brève description de leur objet et de l’activité exercée, suffisante pour permettre au contrôleur de vérifier les conditions d’assujettissement et de préparer un examen approfondi si celui-ci devait être requis.

L’OAR précisera les documents à fournir, les modalités du contrôle et la fréquence des vérifications, sur la base d’une approche fondée sur les risques. Des contrôles plus fréquents seront ainsi prévus pour les conseillers exerçant dans des domaines à risque élevé.

Si des indices objectifs de manquements aux obligations de diligence sont constatés, par exemple l’absence de formation, de règlement interne, de mesures correctives après un précédent contrôle, ou l’ouverture d’une procédure pénale, le contrôleur peut demander la levée du secret professionnel.

Celle-ci intervient soit avec le consentement du client, soit sur décision du tribunal des mesures de contrainte (art. 18a al. 5 nLBA). Cette levée est strictement limitée à la vérification du respect des obligations de diligence du conseiller, et non au comportement du client. Le tribunal compétent est celui du lieu d’établissement du conseiller, et il peut ordonner des mesures de protection telles que le caviardage ou le tri des pièces.

Après avoir procédé à l’examen, généralement sur une base aléatoire à partir de la liste des mandats, le contrôleur établit un rapport à l’intention de l’OAR. Ce rapport doit être entièrement anonymisé : aucune donnée personnelle des clients ne peut être transmise à l’OAR. Celui-ci dispose du pouvoir de sanctionner les conseillers soumis à la LBA sur la base du rapport établi par le contrôleur. Conformément à l’article 25 al. 3 nLBA, il peut adopter les mesures disciplinaires ou correctrices appropriées, telles qu’un avertissement, une amende, la suspension ou l’exclusion du membre concerné. Ces mesures visent exclusivement le conseiller lui-même, c’est-à-dire l’avocat ou le notaire soumis au contrôle, et non ses clients. L’OAR ne peut en aucun cas transmettre d’informations relatives aux clients à d’autres autorités.

Les relations entre les OAR et leurs affiliés relèvent du droit privé (art. 24b nLBA), de sorte que les sanctions en cas de violation de la LBA ou des règlements demeurent fixées par les OAR eux-mêmes. L’article 25 al. 3 let. c nLBA, impose désormais que ces sanctions soient appropriées, efficaces et proportionnées, et en précise les formes possibles (avertissement, blâme, peine conventionnelle).

Les OAR devront établir un cadre commun de sanctions prévoyant notamment des plafonds pécuniaires absolus et relatifs, suffisamment dissuasifs pour satisfaire aux exigences du GAFI, un maximum d’un million de francs d’amende étant jugé adéquat pour le secteur parabancaire et de conseil. Enfin, les sanctions pourront être contestées devant un tribunal arbitral commun, conformément à l’article 25 al. 3 let. d nLBA.

L’article 25a nLBA introduit un tribunal arbitral permanent commun à tous les OAR. Cette innovation vise à renforcer la cohérence de la jurisprudence, à garantir une égalité de traitement entre les affiliés et à réaliser des économies d’échelle en regroupant les compétences dans une seule instance spécialisée.

Ce tribunal sera compétent pour toutes les décisions rendues par les OAR à l’encontre de leurs affiliés, notamment les sanctions disciplinaires, les exclusions ou encore les refus d’affiliation. Il pourra donc également être saisi par des personnes qui ne sont pas encore membres d’un OAR mais dont la demande d’adhésion a été rejetée.

Le tribunal arbitral devra édicter son propre règlement de procédure, conforme aux articles 353 et suivants du CPC. La procédure d’arbitrage devra impérativement respecter les garanties de l’article 6 de la CEDH, en particulier le droit à un procès équitable, l’indépendance et l’impartialité du tribunal. Étant donné que l’affiliation à un OAR est obligatoire pour exercer une activité relevant de la LBA, les professionnels concernés seront également tenus de soumettre leurs litiges au tribunal arbitral : il s’agit donc d’un arbitrage imposé par la loi.

Enfin, la FINMA devra approuver le règlement du tribunal arbitral, en veillant à ce qu’il respecte pleinement les droits procéduraux, notamment la possibilité d’audience publique et l’existence d’un recours devant un tribunal étatique.

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